Cas 8-2022 Mars Interclubs

Dermatopathologie

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Résolu

Présentateurs: S. Bogiatzi (1), G. Hickman (2), M-D. Vignon-Pennamen (1)

CHU: 1. Service d’anatomie pathologique, Hôpital Saint Louis, Paris 2. Service de dermatologie, Hôpital Saint Louis, Paris

Renseignements cliniques:

Jeune homme de 26 ans, en bonne santé habituelle, qui présente une dermatose papulo-vésiculeuse du tronc récidivante depuis début mai 2020. Apparue initialement sur la nuque puis extension sur le tronc en gradient, légèrement prurigineuse. Pas d’atteinte du cuir chevelu ni des muqueuses buccale/génitale.Evolution : fluctuante avec réponse partielle aux dermocorticoïdes classe 4, une régression complète en juillet 2020 puis une nouvelle récidive fin octobre 2021 d’abord sur la nuque puis le torse avec prurit et sensation de brulures, suivie par une régression rapide, spontanée.Pas de nouveau produit topique appliqué, en régime avec restriction calorique stricte depuis le printemps 2020 durant le 1er confinement menant à une perte de 18% du poids corporel.

Diagnostic proposé: Prurigo pigmentosa

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Description histologique

L’examen microscopique met en évidence une importante spongiose de l’épiderme avec formation de vésicules de taille variable à contenu leucocytaire, associée à des nécroses kératinocytaires étagées, un dense infiltrat dermique lympho-histiocytaire périvasculaire superficiel avec exocytose intra-épidermique de lymphocytes et de polynucléaires éosinophiles.

Diagnostic/Commentaires

Le prurigo pigmentosa est une dermatose inflammatoire décrite pour la première fois par Nagashima en 1978. Elle est caractérisée par une éruption érythémateuse papuleuse et souvent micro-vésiculeuse touchant principalement la nuque et les zones séborrhéiques du tronc, associée à un prurit. Elle évolue par poussées qui laissent place à une hyperpigmentation réticulée. Des formes bulleuses ont été décrites. Sa pathophysiologie n’est pas encore très bien élucidée. On sait aujourd’hui que la dermatose survient principalement dans un contexte d’apports alimentaires déséquilibrés avec exclusion de certains aliments, des périodes de jeûne prolongé ou intermittent, ou encore chez des femmes enceintes atteintes d’une hyperémèse gravidique. Ces circonstances indiquent qu’il s’agit d’une dermatose d’origine métabolique et notamment liée à un état de cétose induite par le jeûne ou des carences nutritionnelles acquises. Un lien génétique a été également supposé, du fait de la description d’un plus grand nombre de cas chez les asiatiques mais il est possible que cette entité reste peu diagnostiquée en occident.

Histologiquement, l’image peut être trompeuse en absence de suspicion clinique. L’absence de pâleur kératinocytaire n’oriente pas vers une dermatose carentielle. Les lésions précoces présentent des infiltrats neutrophiles périvasculaires superficiels, tandis que les lésions ultérieures contiennent des infiltrats lymphocytaires et des mélanophages. La présence d’une importante spongiose avec des collections leucocytaires et des nécroses kératinocytaires orientent souvent vers le diagnostic d’eczéma de contact ou de photodermatose. La confrontation avec le contexte clinique permet d’exclure le diagnostic de maladie de Still dont les formes chroniques peuvent avoir sur la biopsie un aspect comparable à celui du prurigo pigmentosa.

Une substitution des carences vitaminiques et la reprise d’un régime équilibré peut apporter une amélioration voire une résolution complètes de lésions. Néanmoins, la maladie étant caractérisée par des récidives fréquentes, un traitement systémique est souvent proposé (tétracyclines, dapsone).