Diagnostic/Commentaires

Le carcinome de type lymphoépithélial a été décrit au niveau du poumon, du thymus, de l’estomac et des glandes salivaires. La localisation cutanée est rare. Elle a été décrite la première fois en 1988 par Swanson et col et depuis, 29 cas ont été rapportés (7). Le carcinome cutané de type lymphoépithélial présente les mêmes aspects morphologiques que le carcinome indifférencié du nasopharynx (UCNT). Contrairement à l’UCNT le carcinome cutané de type lymphoépithélial n’est pas associé au Virus d’Epstein-Barr (2,4). La richesse lymphoïde du stroma peut être responsable de difficultés diagnostiques, d’où l’intérêt de l’immunohistochimie. L’histogenèse de cette tumeur n’est pas connue, l’origine annexielle a été le plus souvent rapportée, celle épidermique plus rarement.

Nous rapportons un nouveau cas de carcinome lymphoépithélial cutané chez une femme de 82 ans, localisée au niveau de la joue, particulier par son association à une kératose preépithéliomateuse et par la sclérose du stroma qui n’est pas habituel dans ce type de tumeur.

Le carcinome de type lymphoépitélial de la peau se présente cliniquement comme un nodule ou un placard ferme solitaire, le plus souvent de la face ou du cuir chevelu (6). Il se voit aussi bien chez l’homme que chez la femme avec un sexe ratio égal. L’âge moyen des patients est de 70 ans avec des extrêmes de 39 à 96 ans. La tumeur est habituellement dermique, infiltre parfois l’hypoderme et le plan profond sous-jacent, sans connexion à l’épiderme (1,7). Elle se dispose en plusieurs nodules faits de cellules carcinomateuses atypiques peu différentiées, enserrées dans un important stroma lymphocytaire réactionnel. Les cellules tumorales expriment le KL1 et l’EMA permettant de confirmer leur nature épithéliale (7,8). Les lymphocytes réactionnels sont réguliers et polyphénotypiques, expriment le CD3 et le CD20 (1,4,8).

L’association de l’EBV au carcinome indifférencié du nasopharynx (UCNT) est bien établie ainsi qu’avec les carcinomes de type lymphoépithélial de localisation pulmonaire, thymique, gastrique et salivaire. Sa présence au niveau de la peau n’a jamais été confirmée (1,2,4,7).

Le diagnostic différentiel se pose en premier avec une localisation secondaire d’un UCNT ou d’un carcinome de type lymphoépithélial d’autres organe. La négativité de l’EBV dans le carcinome cutané lymphoépithélial peut être un élément important en faveur de l’origine primitive de cette tumeur mais ne permet pas d’éliminer une métastase d’un carcinome de type lymphoépithéliale d’un autre organe EBV négatif d’où l’intérêt des investigations clinique et paraclinique.

Le carcinome cutané de type lymphoépithélial peut être aussi confondu avec d’autres tumeurs essentiellement, la tumeur neuroendocrine cutané (tumeur de Merckel), le mélanome, le lymphome malin, la maladie de hodgkin et le lymphadénome cutané bénin, toutefois le recours à l’immunohistochimie permet de redresser le diagnostic. Le lymphadénome cutané est une tumeur bénigne, bien circonscrite caractérisée par son infiltrat lymphocytaire entourant les lobules tumoraux mais contrairement au carcinome cutané de type lymphoépithélial, les cellules sont régulières, monomorphe, sans activité mitotique avec en périphérie des cellules d’aspect basaloïdes disposées en palissade (1).

L’histogenèse de cette tumeur reste inconnue. L’origine annexielle a été souvent rapportée vu l’absence de connexion à l’épiderme, présence parfois de vacuoles intra-cytoplasmiques PAS+ associée à une différentiation folliculaire, glandulaire ou sébacé mais l’envahissement de ces structures par la tumeur ne peut être éliminer (3). L’origine épidermique a été rapportée dans seulement trois observations dans lesquelles la tumeur s’associait à une dysplasie épidermique (9,4). Quelle que soit cette origine, l’originalité de cette entité réside dans l’abondance du stroma lymphoïde qui traduit probablement une réaction particulière de l’hôte responsable souvent de difficulté diagnostic. Le pronostic de cette tumeur semble meilleur que les autres carcinomes de type lymphoépithélial des autres organes malgré l’absence de différentiation histologique. Il semble que l’augmentation des cellules dendritiques dermique dans ce type de tumeur est corréler à un meilleur pronostic.

Références

1-Requena L, Sanchez Yus E, Jimenez E, Roo E. Lymphoepithelioma-like carcinoma of the skin: a light-microscopic and immunohistochemical study. J Cutan Pathol 1994 Dec ; 21 (6) : 541-8
2-Leung EY, Yik YH, Chan JK. Lack of demonstrable EBV in Asian lymphoepithelioma-like carcinoma of skin. Am J Surg Pathol 1995 Aug ; 19 (8) : 974-6
3-Ko T, Muramatsu T, Shirai T. Lymphoepithelioma-like carcinoma of the skin. J Dermatol 1997 Feb; 24 (2) : 104-9
4-Shek TW, Leung EY, Luck IS, Loong F, Chan AC, Yik YH, Lam LK. Am J Dermatopathol 1996 Dec ; 18 (6) : 637-44
5-Rosso R, Paulli M, Carnevali L. Neuroendocrine carcinoma of the skin with lympphoepithelioma-like features. Am J Dermatopathol 1998 Oct ; 20 (5) : 483
6-Dudley CM, Snow SN, Voytovich MC, Warner TF, Hartig GK. Enlarging facial nodule on an elderly patient. Lymphoepithelioma-like carcinoma of the skin. Arch Dermatol. 1998 Dec;134(12):1628-9, 1631-2
7-Ferlicot S, Plantier F, Rethers L, Bui AD, Wechsler J. Lymphoepithelioma-like carcinoma of the skin: a report of 3 Epstein-Barr virus (EBV)-negative additional cases. Immunohistochemical study of the stroma reaction. J Cutan Pathol 2000 : 27 : 306-311
8-Walker AN, Kent D, Mitchel AR. Lymphoepithelioma-like carcinoma in the skin. J Am Academy Dermatol 1990 Apr ; 22(4) : 691-3
9-Lind AC,Breer WA,Wick MR. Lymphoepithelioma-like carcinoma of the skin with apparent origin in the epidermis-a patter or an entity. Cancer 1999 ; 85: 884.

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