Cas 13 – Mars 2010 – Journee de Dermatopathologie
RésoluDescription histologique
Renseignements cliniques complémentaires
Un patient malien de 59 ans, en France depuis 1969 et ayant voyagé au Mali en 2007, consultait en Dermatologie.
Dans ses antécédents, on retrouve un diabète insulino-requérant et une hypertension artérielle.
En 2006, devant une hyperlymphocytose, le diagnostic de lymphome T (infraclinique) associé à l’HTLV1 était porté (77% de lymphocytes CD3+ CD4+ CD25+). Un traitement par AZT et interféron associé du Zelitrex et du Bactrim était débuté.
En 2008, il présentait un tableau associant une altération de l’état général, des sueurs nocturnes, une dysphagie, des dorsalgies inflammatoires et une toux. Le bilan effectué retrouvait une tuberculose médiastinale, latéro-trachéale et rétro-oesophagienne avec confirmation bactériologique d’un Mycobacterium tuberculosis (BK tubages).
Une quadrithérapie était démarrée d’Octobre 2008 à Janvier 2009 relayée par une bithérapie jusqu’en Novembre 2009.
En Octobre 2009, il présente à nouveau une altération de l’état général, des sueurs nocturnes, un prurit diffus, ainsi qu’un œdème distal, des lésions cutanées papuleuses à nodulaires, plus ou moins squameuses, parfois confluentes en plaques d’aspect parqueté, non hypoesthésiques.
Il s’y associait des adénopathies inguinales et axillaires, ainsi qu’une fièvre notée lors de son hospitalisation.
L’examen neurologique retrouvait des paresthésies douloureuses des extrémités, des réflexes un peu vifs, et une hyperesthésie en gants et chaussettes associée à des troubles de la proprioception.
Le bilan biologique retrouvait des LDH = 540 UI/l, le quantiféron était négatif. Les BK tubages étaient négatifs. La TDM thoraco-abdomino-pelvienne montrait une franche diminution de taille des masses médiastinales mais la présence d’ adénopathies inguinales et axillaires.
Une première histologie cutanée était réalisée, qui montrait sur toute la hauteur du derme, un infiltrat inflammatoire sous la forme de petits nodules. Ceux-ci étaient constitués d’histiocytes à cytoplasme clair de type Virchow, mêlé à de rares lymphocytes. Ces granulomes s’observaient également en profondeur autour des glandes sudorales et autour des nerfs. Les colorations de Ziehl à l’eau et à l’huile retrouvaient la présence d’assez nombreux BAAR parfois regroupés en quelques globi.
Au total, cet aspect était davantage en faveur d’une lèpre dans une forme border line lépromateuse que d’une tuberculose.
Les prélèvements des sucs dermiques à la recherche de M.Leprae étaient négatifs au direct et en culture mais la PCR était positive.
La BOM montrait un aspect de myélodysplasie et l’EMG montrait une mononévrite multiple avec myosite distale.
La biopsie neuro-musculaire montrait un infiltrat d’histiocytes de type Virchowien autour des nerfs et dans le muscle, avec la présence de nombreux BAAR.
Au total, l’association de signes cutanés florides, d’une atteinte neurologique et d’une fièvre faisaient discuter une lèpre avec un certain degré de réversion (œdème, douleur) sans doute lié au traitement reçu pour la tuberculose. Un traitement par Oflocet, Lamprène et Dapsone (arrêtée secondairement car résistance et remplacée par la Rifampicine) était débuté, associé à une corticothérapie à 0.5 puis 1 mg/kg/j.
Diminution progressive de l’œdème, des douleurs et disparition de la fièvre.
Moins d’un mois après le début du traitement, réapparition de la fièvre, des douleurs des extrémités, et apparition de nouures diffuses mais prédominant aux membres supérieurs.
EMG : aggravation de la neuropathie.
Réalisation d’une deuxième biopsie cutanée. Celle-ci montre dans le derme et l’hypoderme des lésions nodulaires inflammatoires constituées de cellules épithélioïdes et d’histiocytes parfois fusiformes, en périphérie desquelles on trouve des couronnes de lymphocytes. Ces nodules sont parfois satellites des troncs nerveux, de diamètre augmenté (20à 80 µm). Il s’y associe une importante fibrose dermique et hypodermique. Les colorations de Ziehl et Grocott montrent de rares BAAR fragmentés.
Au total, évolution vers une forme border-line avec réaction histoïde.
Cette réaction a plutôt été considérée comme une réaction de réversion. Le thalidomide n’a pas été introduit et sous maintien de la corticothérapie, les signes cliniques se sont rapidement amendés.